Emmanuel Berl le pacifiste*

Emmanuel Berl, Prise de sang, présentation et biochronologie de Bernard Morlino, postface de Bernard de Fallois, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Le goût des idées », 2020, 250 pages, 13,90 €.

Combattant en 1914, munichois en 1938, comparse de Pierre Drieu la Rochelle avant 1939, apparenté à Marcel Proust et à Henri Bergson, Emmanuel Berl est l’une des figures emblématiques de la vie intellectuelle et littéraire de la France au début du XXe siècle. Sa trajectoire sinueuse, des radicaux et du Front populaire à la réécriture de deux discours de Philippe Pétain, reflète les crispations de l’époque. Essai au style enlevé, Prise de sang est l’examen de conscience d’un juif diasporique, pacifiste non repenti, qui tente de comprendre la réticence des Français devant la guerre et le progrès industriel, qui débouche sur l’écroulement face à l’Allemagne et sur l’Occupation. Dans ce livre, Berl rabroue Mauriac et Kessel pour leurs dérives antisémites, pardonne à Drieu son ralliement à Vichy, parcourt l’histoire diplomatique de l’Europe. Français avant d’être juif, il se sent trahi par cette France qu’il chérit tant et qui, sous le joug du Maréchal, l’a expulsé de la communauté nationale au motif qu’il était juif. Il déplore la tolérance de son pays vis-à-vis de l’antisémitisme, mais n’en réaffirme pas moins sa flamme à la France. Patriote plutôt que nationaliste, Berl se convertit au sionisme en 1946, à cinquante-quatre ans.

Philippe Boulanger

* Auteur de Jean-François Revel. La démocratie libérale à l’épreuve du XXe siècle (Les Belles Lettres, 2014).

(crédit photo : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/1/17/45_cahiers_vert_1957.jpg)

27 Sep 2021

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