Alain Madelin, LFI et le RN sur l’Ukraine
L’ancien ministre de l’Économie Alain Madelin, lors d’une réunion marquant le 3ème anniversaire du Fonds Stratégique d’Investissement à la Caisse des Dépôts et Consignations, déclarait :“Si on est libéral, la priorité absolue c’est de combattre Jean-Luc Mélenchon et ses alliés” .
C’est vrai, y compris sur la question ukrainienne. LFI avance à ce sujet un point de vue apparemment pacifiste et dit benoîtement souhaiter la paix par le chemin de la diplomatie et du dialogue. Voilà qui pourrait être respectable, à défaut d’être juste, si l’hostilité rabique du camp Mélenchon à l’OTAN et aux Etats-Unis n’éclairait d’un jour sinistre les positions de LFI vis à vis de l’Ukraine .
Il faut admettre cependant que le Rassemblement National est plus explicitement encore, attaché à défendre la brutale politique russe actuelle et les options anti-européennes, anti-américaines et anti-démocratiques de celui qui les met en oeuvre : Vladimir Poutine. .
On peut voir là une explication au fait que l’équipe d’Alain Madelin, magnifiquement solidaire de la résistance ukrainienne face à l’armée russe, s’en tienne à la seule critique du RN dans son argumentaire,
Cet argumentaire, il nous semble utile que nos lecteurs en prennent connaissance malgré nos réticences à ne pas voir dénoncées ensemble les deux forces politiques complaisantes envers Poutine et si ce n’est complaisantes, complices de l’entreprise impérialiste russe.
Ce sera la premier document que nous glisserons dans notre rubrique « Archives ».
H&L
L’ENJEU
La politique internationale n’intéresse guère dans une campagne législative. Pourtant, cette fois, elle constitue un enjeu existentiel. De l’issue de l’agression de Poutine contre l’Ukraine dépendront le futur des démocraties et de la France pour les décennies qui viennent.
Car Vladimir Poutine n’a pas seulement déclaré la guerre à l’Ukraine. Il mène une guerre aux démocraties et tout particulièrement à la France.
Les démocraties ne sont pas menacées pour ce qu’elles font dans leur soutien à l’Ukraine, mais pour ce qu’elles sont.
Vladimir Poutine n’a pas attendu février 2022 et la guerre en Ukraine pour s’attaquer à la France, à l’Europe et aux démocraties.
La question n’est donc pas de savoir si on veut ou si on ne veut pas la guerre : on ne veut pas la guerre.
Elle n’est pas de savoir si on aime ou on n’aime pas la guerre : on n’aime pas la guerre.
Nous sommes impliqués dans le conflit ukrainien parce que Poutine nous fait la guerre.
C’EST UNE GUERRE HYBRIDE
Ce n’est pas une guerre comme les autres.
C’est une guerre hybride. Une guerre qui a de multiples facettes. Elle utilise tous les moyens de la déstabilisation et de l’influence : désinformation, manipulation, ingérence électorale, cyber-attaques, utilisation des réseaux sociaux, relais de tous les complotismes …
Son objectif est clairement de déstabiliser les démocraties et de semer le chaos.
L’ingérence électorale
Nous l’avons vu lors des deux dernières élections aux Etats Unis et nous le voyons déjà pour la prochaine. Les preuves sont là.
Nous l’avons vu, chez nous en France dans la campagne présidentielle de 2017.
La déstabilisation des démocraties par le chaos
Nous l’avons vu à Stockholm avec cette mise en scène d’un Coran brûlé – montée en sous-main par la Russie – qui a mis le feu dans le monde musulman et notamment en Turquie avec l’objectif éviter ou retarder l’adhésion de la Suède à l’OTAN.
Nous l’avons vu aux Etats Unis avec, par exemple, le soutien de la Russie apporté à la fois aux suprématistes blancs et à « black lives maters ».
Nous l’avons vu encore en France avec l’hacking des hôpitaux durant la pandémie de Covid 19.
Nous le voyons en France aujourd’hui avec des étoiles de David taguées sur les murs de Paris, le tag des mains rouges sur le « Mur des justes » à l’extérieur du mémorial de la Shoah, les faux cercueils sous la tour Eiffel, toutes manipulations de la Russie.
Nous le voyons encore dans les tentatives d’ingérence de la Russie en Nouvelle Calédonie via l’Azerbaïdjan.
Nous le voyons particulièrement en Afrique où la Russie déploie tout un arsenal : mercenaires, désinformation agressive, ingérence électorale, soutien aux coups d’États…
L’infiltration et la propagande.
Tous les moyens sont bons pour obtenir des complaisances et trouver les relais de sa propagande.
Pour cela Russie de Poutine bénéficie de l’héritage du savoir-faire du KGB.
Tous les milieux sont concernés : affaires, politiques, culture, armée, médias…
Les objectifs de Vladimir Poutine sont clairs :
. Déstabiliser les démocraties,
. Semer les peurs et faire douter les peuples,
. Diviser les Européens,
. Découpler l’Europe des États-Unis,
. Faire reculer la démocratie partout dans le monde.
NOUS DEVONS FAIRE FACE. LA GUERRE EN UKRAINE EST NOTRE GUERRE.
En soutenant le courageux combat des Ukrainiens, nous nous battons pour le respect à la fois de la souveraineté de l’Ukraine et de l’ordre international. Nous nous battons pour la Liberté des Ukrainiens et pour la nôtre.
Pour Poutine cette « opération spéciale » ne s’arrête pas aux frontières de la Crimée et du Donbass. Elle avait clairement pour objet d’installer un pouvoir russe à Kyiv, de soumettre le peuple ukrainien et faire disparaitre l’Ukraine en la russifiant. Car pour Poutine, « le peuple ukrainien n’existe pas ».
Cette guerre et le réarmement de la Russie vont bien au-delà de l’Ukraine.
Pour Poutine « la Russie n’a pas de frontières » comme disaient ses affiches lors des dernières « élections » présidentielles. Ou encore « les frontières de la Russie sont celles de l’Union Soviétique ».
Déjà la Moldavie est clairement menacée, de même les Pays Baltes. La Douma conteste le décret du Conseil d’État de l’URSS « sur la reconnaissance de l’indépendance de la République de Lituanie ».
Le mot paix n’a pas le même sens pour les Russes et pour nous
Poutine et ses alliés veulent défaire l’ordre international au profit d’un ordre « post occidental ». La paix, pour Poutine et ses principaux alliés – comme la Chine ou l’Iran – c’est la constitution d’un « nouvel ordre mondial post -démocratique ».
Il utilise la lutte contre les relents du colonialisme en Afrique et ailleurs pour mieux recoloniser
ceux qui sont sortis de l’emprise de l’URSS.
Le mot compromis n’a pas le même sens non plus.
Dans son long discours pour expliquer son agression de l’ Ukraine, Vladimir Poutine a expliqué qu’il y avait , été contraint compte tenu du refus de prendre en compte le « compromis raisonnable » sur l’OTAN, la paix et la sécurité en Europe qu’il avait présentée en décembre 2022. En fait ce « compromis » était un ultimatum qui exigeait un recul de l’OTAN sur ses positions de 1997. C’est-à-dire de laisser sans défense la Hongrie, la Pologne, la Tchéquie, la Slovaquie et les 3 pays baltes pour les faire revenir sous la coupe de Moscou.
L’agence d’information d’État, RIA Novosti, précisait d’ailleurs très clairement : « Il ne s’agit pas de propositions de discussion, mais bien d’un ultimatum — d’une demande de reddition inconditionnelle. L’Occident n’a pas d’autre choix que de perdre la face — à moins d’entrer en guerre avec la Russie ».
Voici comment Vladimir Poutine conçoit la paix et ce qu’est pour lui une « proposition raisonnable » !
LE RASSEMBLEMENT NATIONAL A MATIGNON,
SERAIT UNE VICTOIRE POUR POUTINE.
L’arrivée à Matignon de Jordan Bardella et du parti de Marine Le Pen serait à coup sûr fêtée au Kremlin, tout comme on y avait naguère sablé le champagne pour la victoire de Donald Trump.
Car le Kremlin y voit, compte tenu des liens du Rassemblement National avec la Russie de Poutine, l’espoir de limiter l’engagement de la France en Ukraine, d’instaurer le doute sur la force et la pérennité d’un soutien efficace de l’Europe à l’Ukraine d’affaiblir le lien transatlantique.
Une longue connivence et des positions inquiétantes.
Ecartons le reproche que l’on fait souvent à Marine Le Pen d’avoir naguère fait financer sa campagne présidentielle par une banque russe. Soyons juste : le fait que le RN n’ait pas trouvé de financement pour sa campagne auprès des banques françaises n’était pas admissible. Pas davantage l’inertie de l’Etat pour réparer cette situation préjudiciable à notre démocratie.
Il n’en reste pas moins que l’obtention d’un tel prêt auprès d’une banque russe montre l’intérêt que Vladimir Poutine porte depuis longtemps à Marine le Pen et au Rassemblement National, tout comme aux autres mouvements populistes dans les différents pays européens.
Cela faisait partie d’une longue stratégie de Poutine dont on peut constater aujourd’hui les effets.
Marine Le Pen, la Russie et Poutine.
Dans toutes ses campagnes électorales récentes, l’expression publique du RN et de ses dirigeants se concentre (avec un certain succès) sur le court terme et la politique intérieure (insécurité, immigration, montée des intégrismes, pouvoir d’achat, échec des politiques publiques des gouvernements passés ou présents).
Marine Le Pen et Jordan Bardella parlent peu et souvent de manière elliptique des grands enjeux internationaux et géopolitiques. Les ambiguïtés de leurs positions et de leurs votes en la matière lissent à masquer le caractère inquiétant des idées qui les animent sur des questions fondamentales aujourd’hui.
Qu’on en juge :
Marine Le Pen préfère la Russie aux États-Unis.
« La France a plus d’intérêts communs culturels et stratégiques avec la Russie qu’avec les Etats-Unis ». Interview au journal russe Kommersant en 2012.
Marine Le Pen « admire Poutine ».
« Je ne cache pas que, dans une certaine mesure, j’admire Vladimir Poutine ». Idem
Quand Marine Le Pen pensait que la démocratie de la Russie de Poutine était plus libre que la démocratie en France.
« Rien ne permet d’affirmer du point de vue constitutionnel que la Russie n’est pas une démocratie. Le ton de la presse d’opposition est bien plus libre et virulent à l’égard de Poutine qu’elle ne l’est en France à l’égard de Sarkozy ».
Quand Marine Le Pen défendait l’agression et l’annexion de la Crimée par la Russie de Poutine.
« La Crimée a été russe pendant deux siècles. Elle a été ukrainienne pendant 80 ans donnée par un dictateur sur un coup de tête, un caprice. Les habitants de la Crimée se sont exprimés librement et ont choisi d’être attachés à la Russie ».
Quand Marine Le Pen se rangeait aux côtés de la Russie accusée d’avoir abattu avec les séparatistes ukrainiens pro-russes un avion de la KLM -Malaysia Airlines.
En juillet 2014, Marine Le Pen se refusait à « accuser les séparatistes du Donbass et même la Russie et à exonérer les forces armées ukrainiennes ». C’est-à-dire l’exact mensonge de Moscou d’alors.
Quand Marine Le Pen défendait l’envoi d’armes françaises… à la Russie.
Après la première agression de la Russie contre l’Ukraine, en septembre 2014, quand le président Hollande a courageusement annulé la livraison du porte-hélicoptères Mistral à la Russie, elle affirme : « il s’agit d’une soumission à la diplomatie américaine ».
La preuve par Mariani.
Thierry Mariani, ancien ministre républicain, est un des plus visibles agent d’influence de la Russie en France.
Il n’a jamais été désavoué par la direction du Rassemblement national dans ses propos et dans son action ouvertement pro Poutine. Au contraire, il était en bonne position sur la liste pour les élections européennes (9ème ).
C’est pourtant lui qui estimait « qu’il n’y a qu’un chef d’état valable en Europe : Poutine ».
Ou encore : « La France a besoin des Russes qui défendent la civilisation européenne »
L’argument de la défense de la civilisation européenne est souvent invoqué à droite. Pourtant Poutine a pour proches alliés la Chine, l’Iran ou la Corée du Nord. Ils défendent ensemble un ordre mondial post occidental fondé sur d’autres valeurs que la démocratie.
Poutine envoie sur le ukrainien des soldats Tchétchènes qui tuent et massacre des chrétiens au nom de Allah Akbar. Il soutient les terroristes du Hamas et vient de reconnaître les talibans.
Curieuse défense de la civilisation chrétienne occidentale !
En 2016, Mariani estime que la France s’est placée au niveau des « laquais de la politique américaine », que « la France fait un copié collé de la politique belliciste américaine » (RT France 11 octobre 2016).
Infatigable admirateur d’Assad, il a été reçu six fois à Damas pour servir la propagande du régime syrien et de son allié russe.
Un autre détail qui en dit long. La fille du porte-parole de Poutine, Dimitri Peskov a été, au Parlement européen, la collaboratrice stagiaire d’Aymeric Chauprade, ex-conseiller de Marine Le Pen, quand celui-ci était député européen.
L’ambiguïté tactique actuelle du RN à propos de la Russie de la guerre en Ukraine est la même que celle qu’elle nourrit à l’égard de l’Europe et de l’union européenne.
Certes, Bardella et Le Pen ne parle plus de Frexit ou de sortie de l’euro, mais nombre de leurs propositions conduise à la mise en cause des traités européens, de la Cour de Justice de l’Union Européenne et de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, au risque d’une crise et d’une division de l’Europe, pour le plus grand plaisir du Kremlin.
Les positions hypocrites du Rassemblement National aujourd’hui doivent être démasquées.
Aujourd’hui bien sûr les dirigeants du Rassemblement National sont plus prudents. En apparence, ils condamnent l’agression russe et affichent une position de soutien à l’Ukraine.
Mais…
S’ils disent aujourd’hui, en paroles, condamner l’agression de la Russie cela se voit beaucoup moins dans les actes, comme le montre les votes du RN au Parlement européen.
Lorsque l’on ne regarde que les votes « contre » (en faisant l’impasse sur toutes les abstentions), on constate à quel point les députés de Marine Le Pen ont joué les soutiens de Poutine :
2019 :
– Résolution contre le fait de traiter la Russie comme partenaire stratégique. Contre.
– Résolution condamnant les violations des droits de l’homme en Russie. Contre
– Résolution condamnant la loi russe sur les « agents de l’étranger ». Contre.
2020 :
– Résolutions pour une lutte européenne contre les menaces russes sur la sécurité de l’Europe et les ingérences. Contre.
– Résolution contre l’empoisonnement de Navalny ainsi que contre le coup de force de Loukachenko en Biélorussie. Contre.
2021 :
– Résolution condamnant l’arrestation la détention de l’opposant russe Pivovarov. Contre
– Résolution appelant au retrait des forces russes accumulées à la frontière ukrainienne. Contre
– Résolution condamnant la fermeture de Memorial et la répression des organisations de la société civile par la Russie. Contre. 2021.
– Résolution approuvant soutien financier à l’Ukraine. Contre…
Après la mort tragique de l’opposant Alexeï Navalny en Sibérie, le président du Rassemblement National Jordan Bardella a écrit sur X « Navalny est mort dans la prison de l’Arctique où il purgeait une peine de 19 ans pour son opposition au régime. C’est une nouvelle tragique pour tous les défenseurs des droits humains et des libertés fondamentales ». Poutine ? Connais pas.
Certains se sont pressés de rappeler qu’en avril 2021, le RN vote contre la résolution demandant la libération de Navalny,
– en février 2023, le RN s’abstient sur la résolution dénonçant les conditions de détention de Navalny,
en avril 2023, le RN s’abstient sur la résolution dénonçant la répression de Navalny.
À l’Assemblée nationale lors du vote sur l’accord bilatéral conclu entre la France et l’Ukraine, le Rassemblement National s’est abstenu malgré ses bonnes paroles de soutien à l’Ukraine (les Insoumis et le Parti Communiste ont voté contre).
De quelle paix le Rassemblement National parle-t-il ?
Ils disent vouloir la paix en Ukraine. Mais qui ne la veut pas ?
La question c’est de savoir comment obtenir cette paix.
Parler de la priorité à donner à la voie diplomatique ? C’est se donner le beau rôle et n’engage pas à grand-chose. La question est ce que l’on fait maintenant et les engagements que l’on prend vis-à-vis de l’Ukraine si Poutine mène une guerre d’usure.
Est-ce un cessez-le-feu ? Ce serait accepter une situation de fait dans laquelle quatre oblasts ukrainiens et la Crimée ont été d’ores et déjà annexés par la Russie de Poutine. Ce serait accepter la russification de force de ces territoires ukrainiens, la déportation des enfants (pour laquelle Vladimir Poutine a été inculpé par la Cour Pénale Internationale), l’élimination impitoyable de l’administration ukrainienne, des intellectuels, des journalistes, et des familles suspectées de sentiments pro ukrainiens.
D’ailleurs Poutine ne veut pas de cessez-le-feu. Quand il en parle, pour se donner le beau rôle, il l’assorti de conditions inacceptables comme l’abandon définitif des territoires occupés et même le retrait des troupes ukrainiennes de territoires supplémentaires !
Poutine affiche toujours l’objectif de prendre Kyiv et Odessa tout comme celui d’abattre le gouvernement « nazi » de Zelenski.
Vouloir vrai la paix aujourd’hui, c’est tout faire pour aider les Ukrainiens, empêcher l’armée russe d’avancer en continuant à bombarder les villes d’Ukraine et les populations civiles. C’est prendre l’engagement de soutenir l’Ukraine aussi longtemps qu’il le faudra pour montrer à Poutine qu’il ne gagnera pas cette guerre.
Le Rassemblement National entend rogner le soutien de la France à l’Ukraine.
Comme il ne peut le faire franchement, il se prépare à le faire hypocritement.
Que disent-ils ?
D’accord, d’accord, la Russie de Poutine a agressé l’Ukraine.
D’accord, d’accord, il faut aider l’Ukraine.
Mais, il faut le faire avec prudence.
De
– Il faut éviter une 3ème guerre mondiale nucléaire.
– Il faut éviter l’escalade, limiter la portée des armes que nous livrons.
– Il ne faut pas que nous puissions être considérés comme cobelligérants. Donc il ne faut pas envoyer de militaires français en Ukraine.
Le Rassemblement National joue sur les peurs
Ces arguments portent sur une partie de l’opinion française.
Dans un face-à-face sur LCI où l’on interrogeait des électeurs du Rassemblement National, il y avait le témoignage d’une femme émue qui disait « je vote pour le Rassemblement National parce que j’ai peur de la guerre nucléaire, peur que l’on envoie nos enfants faire la guerre en Ukraine ».
Il faut répondre sur ces trois points.
– Pour Vladimir Poutine l’arme nucléaire est surtout une arme de propagande. Poutine, suivi par la propagande russe hystérique, agite en permanence la menace nucléaire, car il sait qu’elle fait peur à l’opinion occidentale. Il faut savoir en tenir compte. Mais il faut savoir aussi que l’arme nucléaire est dans toutes les doctrines militaires – y compris la doctrine russe – une arme que l’on utilise que lorsque les intérêts vitaux d’un pays sont menacés. Tel n’est pas le cas de la Russie. Son existence même n’est menacée par personne. Ni par les ukrainiens, ni par l’OTAN. Il n’y a aucun prétexte, ni aucune raison militaire, pour la Russie d’utiliser une arme nucléaire, fusse-t-elle tactique.
La rupture du contrat implicite conclu entre toutes les puissances nucléaires et de réserver son utilisation à une menace existentielle. La rupture de ce contrat mettrait durablement la Russie au ban des nations. La Chine a mis en garde la Russie. Les Américains ont expliqué quelle seraient leur riposte, une riposte conventionnelle qui détruirait une large partie de l’armée russe en guise d’avertissement.
– Nous aidons seulement les Ukrainiens à se défendre, souvent trop peu et trop tard par rapport à l’escalade de l’offensive russe. L’aide militaire légitime (au regard du droit international) que les alliés apportent à l’Ukraine est exclusivement une aide défensive qui ne fait que suivre l’escalade russe.
Rappelons que la Russie a non seulement violé les règles du droit international sur la souveraineté des Etats, mais encore un engagement plus spécifique dans lequel la Russie s’engageait à respecter les frontières ukrainiennes. Il s’agit du « mémorandum de Budapest » concernant le désarmement nucléaire de l’Ukraine (et aussi de la Biélorussie et du Kazakhstan). La Chine et la France se joindront un peu plus tard à ce mémorandum.
Avec la chute de l’URSS, l’Ukraine s’est retrouvée avec un parc nucléaire considérable. Environ le tiers de celui de l’URSS. L’Ukraine acceptait de se défaire de son énorme stock d’armes nucléaires en échange de cette garantie de sécurité.
On peut donc dire que les pays signataires de cet accord pourraient se réclamer d’un droit à le faire respecter.
– Le mot de « cobelligérance » est utilisé pour faire peur. Il n’a pas de signification très précise en droit international. L’Allemagne et la Russie qui attaque ensemble la Pologne en 1939 constitue une cobelligérance. Livrer des armes ce n’est pas de la cobelligérance. En revanche, si des avions américains pilotés par les militaires américains se battaient contre les avions russes, on pourrait dire que nous entrerions dans une forme de cobelligérance.
Le président Macron n’a jamais proposé d’envoyer des soldats français se battre en Ukraine. Il a seulement voulu rendre visibles, et peut-être d’amplifier – sans doute dans le but de dissuader –les aides techniques que différents pays apportent déjà à l’Ukraine depuis longtemps.
CE QUE SIGNIFIERAIT L’ABANDON DE L’UKRAINE.
La France joue un des premiers rôles en Europe. Son désengagement même très partiel serait source d’une grave crise de confiance en Europe.
Si le barrage aux ambitions de Poutine devait céder, si nous devions voir l’Amérique regarder ailleurs, si nous abandonnions ainsi nos valeurs morales et nos valeurs démocratiques, qui pourrait encore faire confiance à l’Occident et aux démocraties ?
Voilà qui encouragerait Poutine et ses amis à se lancer dans de nouvelles conquêtes devant un Occident si faible et si divisé.
L’arme nucléaire jusqu’à présent a servi de dissuasion. Mais désormais pour Poutine, elle a aussi servi de parapluie pour mener une guerre d’invasion. Voilà qui servira d’exemple et qui encouragera bien d’autres pays à se doter d’un armement nucléaire.
Si nous voulons un monde plus sûr, si nous pensons qu’il faut défendre et protéger nos valeurs démocratiques, ne pas abandonner l’Ukraine et détricoter la solidarité européenne, il faut dire maintenant ses quatre vérités au Rassemblement National.
Faire face pour défendre notre souveraineté, la souveraineté de l’Ukraine et non la souveraineté agressive de la Russie.
Ceux qui sont tentés par le vote Rassemblement National doivent prendre conscience qu’on ne peut se dire « patriote » en France en étant à ce point inféodé à la Russie de Poutine.
(Cette fiche a été rédigée au mois de juin 2024, alors que le succès écrasant du RN aux législatives semblait acquis).
15 Juil 2024