Le 11 janvier 2023

Washington 6 janvier 2021. Brasilia 8 janvier 2023.

Les émeutes anti-démocratiques qui ont pris place à Brasilia dimanche 8 janvier 2023, soit pratiquement deux ans après d’autres émeutes anti-démocratiques à Washington le 6 janvier 2021, doivent retenir l’attention de tous les démocrates et de toutes les personnes soucieuses de préserver les libertés sur notre planète.

Et tout d’abord, ces deux émeutes jumelles (que le principal inspirateur de Donald Trump, Steve Bannon, reconnaît lui-même comme jumelles) doivent être prises très au sérieux. Je me souviens avoir été considéré comme paranoïaque pour avoir très vite retenu que les émeutes du 6 janvier 2021 étaient une vraie tentative de coup d’Etat aux Etats-Unis.

Pourtant, tout ce qu’on a appris ensuite, grâce surtout aux investigations ultérieures du Congrès américain, a confirmé qu’il s’était bien alors agi d’une tentative de coup d’Etat (même si elle fut un peu brouillonne). Trump avait clairement envisagé que, sous la menace des émeutiers, Mike Pence (qui présidait les instances du Congrès chargées de valider les résultats) opte pour invalider les résultats en sorte que, avec une complicité de la Cour Suprême qu’il anticipait à tort ou à raison, il puisse se maintenir à la Maison Blanche. Dans la mesure où Trump ne semble pas s’être préalablement assuré de complicités dans l’armée américaine, sa tentative de coup d’Etat était vouée à l’échec. Mais ce n’était pas du tout une raison pour sous-estimer la nature de la manœuvre de Trump.

Trump en réalité a commis alors un acte extrêmement grave, celui de chercher à se maintenir au pouvoir en dépit du verdict électoral. Et quelqu’un comme Steve Bannon a fort bien pu encourager Trump dans sa démarche jusqu’au-boutiste pour pouvoir prendre la mesure de comment la société américaine dans son ensemble réagirait à un acte aussi anti-démocratique.

En quelque sorte, le 6 janvier était une tentative de coup d’Etat mais c’était peut-être aussi une expérimentation de coup d’Etat. Par exemple, les partisans de Trump et de Bannon ont pu constater (pour s’en réjouir) que la Garde Nationale était restée longtemps passive et n’avait pas été du tout à la hauteur de ses responsabilités en matière de défense de la démocratie américaine. Ils ont pu constater (pour s’en réjouir aussi) que l’émeute anti-démocratique n’avait pas suscité la réaction populaire pro-démocratie  qu’on aurait pu attendre et qui aurait uni dans la rue Démocrates et Républicains.

Ce Bis Repetita (Brasilia, deux ans après Washington) me conforte bien entendu davantage dans ma caractérisation initiale du coup du 6 janvier 2021. Constater que Steve Bannon est au premier rang de ceux qui applaudissent le coup de Brasilia est à mes yeux très révélateur. Dans l’un et l’autre cas, une fraction (malheureusement assez importante) de la population s’est mobilisée pour interrompre le fonctionnement démocratique d’un grand pays.

A Brasilia, les miliciens sont même allés plus loin encore qu’à Washington deux ans auparavant : leurs slogans et leurs calicots réclamaient explicitement « la suppression des trois pouvoirs ». En clair, ils revendiquaient d’instaurer au Brésil un système où le pouvoir exécutif, le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire seraient fusionnés en une seule main. C’était réclamer explicitement l’abolition du principe démocratique lui-même ; c’était aussi revendiquer l’instauration au Brésil d’un régime totalitaire dans la mesure où une subordination totale de la Justice au pouvoir constitue une pièce essentielle et indispensable à tout régime totalitaire.

Ces émeutes anti-démocratiques aux Etats-Unis et au Brésil doivent nous tenir plus que jamais en alerte. Les capitales de l’axe totalitaire (Pékin, Moscou et Téhéran), non contentes de la répression intense qu’elles maintiennent à l’encontre des populations sous leur contrôle, menacent militairement deux pays souverains, l’Ukraine et Taïwan, deux pays dont par ailleurs la population prouve quotidiennement son attachement à la démocratie libérale.

Et en même temps, comme en écho à ces trois capitales totalitaires, on voit se développer aux Etats-Unis at au Brésil des mouvements pro-totalitaires qu’il faut bien identifier comme tels.

Le moment est venu de prendre en compte que des liens de plus en plus manifestes se tissent entre les capitales totalitaires et ces mouvements pro-totalitaires dans nos pays démocratiques : ce qui est très révélateur à ce sujet, ce sont les relations intenses (qui ne sont désormais plus contestées) entre Poutine et Trump, entre Trump et Bolsonaro, entre Poutine et Bolsonaro.

Si un jour, par malheur, un coup pro-totalitaire devait réussir aux Etats-Unis ou au Brésil, nul doute que les capitales totalitaires sableraient le champagne sans délai, tant ce qui prime chez elles, c’est une volonté obsessionnelle d’affaiblir et même d’anéantir la démocratie et les libertés, non seulement sur leurs territoires mais aussi sur le reste de la planète.

Antoine Brunet

17 Jan 2023

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