Considérations à discuter entre amis
Israël a deux problèmes.
La guerre qu’Israël doit mener et gagner contre le régime islamiste du Hamas ne doit pas lui faire perdre de vue le conflit territorial entre le peuple israélien et le peuple palestinien, car l’islamisme profite de l’absence d’un État palestinien, qu’il a lui-même rendu impossible en poignardant l’espoir né à Oslo.
Israël a pour tâche prioritaire et indiscutable de détruire ou de réduire le régime du Hamas, tout comme les Alliés devaient détruire le régime nazi.
Cela ne signifie pas éradiquer l’islamisme, qui est une idéologie conquérante mondiale et pour certaines populations, une identité aux racines religieuses et nationales.
Le nazisme et le communisme étaient des religions séculières mais pas des identités anthropologiques.
Faire renoncer massivement les musulmans à l’islamisme revanchard et conquérant prendra peut-être des siècles.
En attendant, il faut se défendre contre cet islamisme conquérant, au-dehors et au dedans de nos sociétés.
Mais Israël (et ses alliés) ont une autre tâche : proposer aux Palestiniens un avenir acceptable (un État à eux) à la condition sine qua non qu’il ne menace pas Israël de disparition.
Même si les conditions de cette solution à deux États ne sont pas réalisables aujourd’hui, l’État d’Israël pourrait proposer unilatéralement cette issue, à la condition que l’État des Palestiniens offre les garanties de ne pas devenir une menace mortelle pour l’État d’Israël ni un agresseur pour d’autres.
La première de ce ces conditions est l’existence de deux partenaires soutenant ce principe, avec les déplacements de population qu’il suppose.
Côté israélien, ce changement politique bouleversant n’est pas définitivement inenvisageable à court ou moyen terme
Côté palestinien, il faudrait un changement radical des mentalités, l’apparition d’un Nelson Mandela, et la bénédiction de certains États arabes pour le parrainer.
Mais il n’est pas nécessaire à Israël d’attendre que ces conditions soient remplies du côté palestinien pour présenter cette perspective aux Palestiniens.
À vous lire
André Senik
Faire renoncer massivement les musulmans à l’islamisme revanchard et conquérant » n’est pas un des « deux problèmes d’Israël ».
C’est un problème de l’Humanité toute entière — et de l’Islam lui-même pour commencer.
Le « processus » que vous évoquez prendra moins de « siècles » si l’humanité « infidèle » ou athée le prend à bras le corps collectivement et définit son agenda en se concertant avec l’Islam et l’Arabe du futur : fût-ce encore confusément ou à reculons, chaque jour un peu plus de musulmans manifestent le désir de trouver leur place dans l’Humanité des Lumières, celle que l’Occident tend promouvoir à l’encontre de ses obscurantistes internes (« réactionnaires » chrétiens, juifs, musulmans ou païens et millénaristes « progressistes » wokistes, droitsdelhommistes et marxistes conscients et inconscients).
Pour que l’Humanité non musulmane (théiste, agnostique et athée) parvienne d’abord à s’unir puis à se concerter avec les musulmans éclairés pour mieux moderniser/rationaliser l’Islam traditionnel, encore faut-il que :
a) elle se modernise/rationalise elle-même en se défiant des « demi-habiles » et des « demi-savants » comtistes et laïcards qui l’incitent à croire que la religion ne saurait être qu’irrationnelle et que le moyen le plus efficace pour lutter contre l’irrationalité religieuse est de faire de chaque croyant un athée et non de rationaliser patiemment, par le dialogue notamment, le contenu des religions traditionnelles ;
b) elle se dote des institutions adaptées à ce travail de rationalisation collectif autant que croisé.
L’Occident l’oublie facilement : l’obscurantisme athée a plus de destructions à son actif que l’obscurantisme juif ou chrétien et, à côté des Lumières matérialistes, des Lumières spiritualistes ont lui chez les Protestants comme chez les Catholiques et les Juifs qui ont contribué aux premières.
Le retour aux Lumières dont nous avons besoin pour corriger les dérèglements de chacun sera mondial et il concernera les laïques aussi bien que les religieux ou il ne sera pas.
Jean-Pierre Airut
Cher André,
Une fois de plus, c’est toi qui a lancé le débat.
Merci.
L’heure est trop grave pour qu’on se taise et qu’on ne cherche pas des solutions à la situation actuelle au Moyen-Orient. Encore qu’il s’agira moins d’un débat en ce qui me concerne, qu’une approbation du leitmotiv de ton texte : la solution est à chercher dans la mise en place de deux Etats. Mais les problèmes posés par ce projet de deux Etats, sont immenses : la paix entre eux, et la sécurité de leurs citoyens doivent être garanties et même assurées. Sinon, l’Etat palestinien ne pourra pas être bâti aux côtés de l’Etat israélien. Il faudra donc trouver des formes de contrôles acceptés par les deux populations.
Il faut imaginer pour cela une force internationale puissante pour empêcher toute menée agressive de part et d’autre. Mais cela ne suffit pas. Il faut aussi – et c’est bien plus difficile à obtenir – des engagements, de part et d’autre, à ne pas développer de l’Autre une image haïssable comme c’est souvent le cas chez les Palestiniens et comme c’est le cas d’une minorité non négligeable chez les Israéliens.
Je ne crois pas qu’on puisse y parvenir rapidement. L’image du Juif est fortement négative dans le monde musulman et celui-ci, comme jadis les Etats communistes, pense par exemple définitives ses conquêtes et n’hésite pas à parler de « terre d’Islam ». Il n’y a pas de terre d’Islam; il n’y a que des terres conquises au détriment d’une population antérieure. Et comme on ne remontera jamais à coup sûr au premier occupant, si l’on ne veut pas que le conflit se prolonge, il faudra bien en passer par la reconnaissance légitime de l’Etat juif.
En attendant, il va falloir travailler activement à montrer que les thèses avancées par le Hamas sont ou fausses ou illégitimes, et qu’il n’est pas un adversaire des Israéliens mais une organisation de type totalitaire, pratiquant le terrorisme, et visant, au delà de la destruction de l’Etat d’Israël, la disparition de tout Etat démocratique. Le problème est en effet mondial.
Pierre Rigoulot
24 Oct 2023